Maman aimait courir, toujours tôt, à l’air frais du matin, quand aucun bruit humain n’amoindrissait son plaisir. Connaissant tout à fait son parcours, passant ici sur un tapis d’ajoncs, là dans un amas d’imposants cailloux (du granit). Maman oubliait son mal. Courir ainsi la transportait loin du tracas qu’on lui causait à l’hôpital. Un jour, Maman n’a plus voulu qu’on lui administrât aucun soin palliatif. Courir sur son îlot fut son calmant final. Un lundi matin, son corps raidi tomba du lit : la mort, l’Ankou, avait fait son travail dans la nuit. Papa hurlait. Dormant non loin, j’avais tout compris. Plus jamais sa voix n’apaisa mon chagrin. Plus jamais son parfum n’adoucit mon affliction. Jamais plus nous n’aurons l’occasion d’unir nos mots d’amour.