Botho Strauss

Julius et Olaf installés ou plutôt affalés sur leur confortable fauteuil ont pour seule occupation, tour à tour, d’observer les mouvements de rue depuis leur fenêtre et les commenter :

« Tiens, en voilà une avec sa jupe au ras du genou – par ce froid ! – en collant noir »

Et soudain, la passante en mini-jupe, sujet croustillant de leur discussion, fait intrusion dans leur salon. Elle leur reproche d’avoir porté sur elle un jugement un peu trop hâtif !

« Vous venez de parler de moi ? c’est bien vous ? qu’est-ce que vous racontez là ? […] Qu’est-ce que vous savez de moi ? Rien. »

Et après cette jeune fille, Marie-Steuber, d’autres vont entrer en scène : « l’Homme sans montre », « l’Impatiente », « l’Homme en manteau d’hiver », « la Femme-Sommeil » ou « le parfait inconnu».

Il s’agit d’une pièce de théâtre, du dramaturge allemand Botho Strauss. Chacun des personnages fait état de son mal-être. En entrant dans cette Chambre, fini la notion de temps ! Un kaléidoscope de vies y est présenté, dans cet espace, la chambre, où le temps s’écoule, dénué de chronologie, par bribes de scénettes reliées ou non entre elles .

Botho Strauss , écrivait à propos du théâtre « Quand il réussit, quand il utilise les comédiens pour ramener le plus lointain à une inconcevable proximité, le théâtre acquiert une beauté déconcertante, et le présent gagne des instants qui le complètent d’une manière insoupçonnée.»



Avec ces instants de vie, Botho Strauss essaie de matérialiser l’absurde et le non-sens. Il ressort de la lecture de cette pièce décousue un patchwork de ressentis. Pas de logique imposée, c’est en lisant cette pièce qu’elle se bâtit sur la trame de notre inconscient, à la lisière de la conscience.

Les certitudes tombent en chute libre pendant que l’imaginaire s’offre un vol plané… !

Un trentenaire allemand s'occupe de son jeune fils dans sa maison de campagne près de Berlin. L'occasion pour lui de se lancer dans une introspection et une critique sans concession de notre société post-industrielle.

On passe un moment stimulant à suivre Botho Strauss dans ses réflexions.

Qu'est-ce qu'un héros ? nous demande Botho Strauss en nous offrant cette lecture du retour d'Ulysse.



Créée en 1996 par le grand dramaturge allemand Botho Strauss, "Ithaque" est une relecture des "Chants du retour d'Ulysse" dans l'Odyssée, narrant l'arrivée d'Ulysse à Ithaque, ses retrouvailles avec Télémaque et Pénélope, et sa lutte contre les prétendants.

L'avant-propos de l'édition française du texte (aux éditions de l'Arche) est pertinente : "Lorsque Botho Strauss revisite le mythe d'Ulysse, celui-ci nous apparaît sous un jour nouveau. Cette pièce, contemporaine à tous égards, offre un réseau de questionnements : comment sortir d'un conflit ? Qu'est-ce qu'un héros ? De quelle manière revenir au pouvoir après des années d'absence ? Et surtout, comment remettre de l'ordre dans une situation chaotique ?".

La terrible phrase finale d'Athéna : "Quant à nous, nous décrétons ce qui est juste et vrai : les crimes commis par le roi sont effacés de la mémoire du peuple. Le maître et ses sujets s'aiment mutuellement comme autrefois."

La mise en scène de Jean-Louis Martinelli en ce moment au théâtre des Amandiers rend pleinement justice au texte de Strauss, en exploitant intensément les abondantes didascalies fournies par l'auteur allemand. Charles Berling y est un très grand Ulysse, Ronit Elkabetz une troublante Pénélope, Clément Clavel un attachant Télémaque, et Grétel Delattre une redoutable Athéna. Le livret réalisé pour l'occasion est précieux, contenant d'excellents entretiens avec le metteur en scène et les deux principaux acteurs, ainsi qu'avec le passionnant scénographe Gilles Taschet.

Une réécriture moderne de la pièce de Shakespeare : Titus Andronicus



Un texte qui n'a d'intérêt que si l'on connaît déjà bien le celui de Shakespeare et qui introduit une réflexion très pertinente sur nos rapports actuels aux traumatismes, (ou à la violence).




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J'ai étudié ce livre car il a été au programme de l'agrégation de lettres modernes. Mais malgré les analyses, je ne l'ai pas vraiment aimé. C'est une caricature de Titus Andronicus, on tombe dans l'excès, malgré les intentions philosophiques. Alors certes, la modernité est dans la surenchère de la violence, mais ce n'est pas agréable à lire.

Cette pièce dès les premières pages nous surprend. Deux hommes flânent sur leurs fauteuils respectifs tout en faisant des commentaires sur les passants qu'ils aperçoivent de leur fenêtre. Mais alors qu'ils commentent la tenue vestimentaire d'une femme en jupe, celle-ci débarque dans leur salon pour les remettre à leur place. Commence alors un défilé devant leurs yeux de personnes, de figures, exposant leurs griefs, leurs émois.



C'est une pièce que j'adore. Elle est foisonnante et touche juste. Elle nous parle de nous avec des images, des "figures" comme on les appelle en théâtre contemporain.

Et cette scène de trois pages résumant et rafraîchissant merveilleusement "Médée", cette tragédie grecque! C'est quelque chose!
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Quelle est donc la nature de cette impatience, quasiment eschatologique voire millénariste par sa violence, que l'on observe dans le premier texte de notre recueil (1), qui constitua la postface de la version allemande des Réelles présences de George Steiner ?
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Des séquences romanesques, de simples plans comme dans l’imaginaire cinématographique, des monologues plutôt inquiétants. Botho Strauss déploie une langue limpide, précise et cependant ouverte, pour approcher les malaises de notre quotidien.



Tout est dans l’épaisseur, la densité des phrases, le poids des mots, les clair-obscurs des situations. Ici, ni simplification, ni rachitisme, l’approche, l’exposition est volontairement partielle, quelque fois ambiguë. Pourtant derrière ces courts textes, suintent les interrogations, l’angoisse, notre société étriquée.



« Quand l’après-midi, il fit place nette sur son bureau, il eut le sentiment qu’ici pour l’essentiel tout était réglé. Dès le lendemain un autre pourrait prendre sa place sans difficulté. »



Un livre sur la pénombre et les mensonges.