AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Charybde2


En 2011, Agnès Varda, désormais munie d’une caméra numérique, filme ses voyages dans le monde, cinq épisodes d’une série documentaire où on la verra aussi bien cinéaste que plasticienne, invitée partout, aimée, fêtée, qui en profite pour découvrir et faire connaître le travail d’autres artistes.
Tout commence, cependant, par l’arbre de sa cour, rue Daguerre, dont il faut tailler les branches parce qu’elles mangent la lumière, explique-t-elle. Elle filme la coupe à la scie, le bruit à vif après le froissement du feuillage, ce qui tombe à terre, dépouillement, nudité dont on retient les blessures apparentes alors que l’écorce, la silhouette de l’arbre, le tronc enfin font écran, ou plutôt arrière-plan destiné à présenter, à soutenir le générique.
Ensuite, Varda s’en va. Pendant ce temps l’arbre repousse et, très vite, en moins de trois mois, redevient tel quel. Au début de chaque épisode, on en retrouve derrière une fenêtre les feuilles frémissantes, le nichoir attaché à une branche. Quelques instants plus tard, le rideau blanc, très beau, de la fenêtre qu’on imagine être celle d’une chambre, que l’on ne fait que deviner, se ferme et le film peut commencer. « Je voyais, filmais des fragments, l’arbre renaissait » résume-t-elle.
Cet arbre dans la cour, puisqu’il s’agit d’une cour fermée, soustraite aux regards par un grand portail à code ou à clés, demeure invisible pour qui marche dans la rue Daguerre. Quelles feuilles, quelles branches se cachent dans le décor ? Ici et maintenant, nous n’en savons rien. Ne pouvons compter que sur ces images gardées en mémoire : le vert qui envahit puis révèle la pierre ou la brique blanches, l’air et la lumière – lumière, l’un des premiers mots qu’elle emploie, Varda, elle qui fut d’abord photographe et justement fait le portrait de l’arbre pour définir, pendant qu’il ne cesse de croître, son projet : un feuilleton de feuilles.
La fenêtre se ferme sur le rideau et ses décorations florales, dont on perçoit en transparence la trame.
Ce que nous emportons sans le savoir : l’idée du vivant en un point précis et fixe, en pleine expansion tandis qu’une femme s’en va explorer le monde.
Commenter  J’apprécie          00









{* *}