Fim en noir et blanc de l'expédition au Kalahari de Laurens Van der Post
Sa vie de chasseur lui faisait une nécessité vitale d'emmagasiner de grosses réserves de nourriture dans son corps, aussi, quand il était repu son ventre était-il aussi énorme que celui d'une femme enceinte. Si la saison avait été bonne, sa silhouette ressemblait à celle d'un Cupidon de Rubens, avec avancées devant et derrière. Oui, c'était là une autre des particularités exclusives de ce petit corps original. Son derrière lui rendait à peu près le même service que la bosse du chameau! Par ce procédé, la nature lui permettait d'emmagasiner de précieuses réserves de graisses et d'hydrates de carbone pour les jours de disette. Je crois bien que le premier terme scientifique que j'aie jamais appris à été le nom donné par les savants à ce phénomène: stéatopygie.
Je vous admirerais plus si vous vous suicidiez. Comment un officier de votre rang peut-il supporter d'avoir été capturé?
Vers les trois heures du matin notre guetteur fut abasourdi de voir l'élégante silhouette de Yonoi apparaître à hauteur de la palissade et refouler la sentinelle vers la porte du camp. Un moment il s'imagina avoir vu un fantôme car, comme beaucoup d'entre nous, il pensait que Yonoi avait fait hara-kiri quelques jours auparavant. Pourtant c'était bien Yonoi : il avait une démarche et une carrure tout à fait caractéristiques. Après être resté debout devant Celliers et l'avoir contemplé longuement en silence, Yonoi mit la main dans sa poche et en sortit quelque chose qui brilla comme de l'argent sous la clarté de la lune. Quelque que cela puisse paraître, notre homme eut la conviction qu'il s'agissait d'une paire de ciseaux car Yonoi, visiblement se pencha au-dessus de la tête de Celliers, prit sa longue chevelure dans sa main et en coupa une mèche. [...] Un certain temps s'était écoulé pendant lequel Yonoi était resté sur place, abîmé dans une méditation profonde, avant de s'incliner très bas devant Celliers, tout à fait de la même façon, avait confirmé notre témoin, que le jour de l'anniversaire de la naissance de son empereur où il s'était recueilli devant le soleil levant.
Les deux attirances - celle qui est consciente et lucide, et l'autre, celle qui est enfouie dans les profondeurs - que les Japonais éprouvent pour la lune semblait se confondre en une seule chez Hara. Si jamais il y eu sur cette terre une âme captive de la lune, hantée par la lune, rythmée par la lune, c'est bien la sienne. A mesure que la lune grossissait - et comme elle savait le faire dans ce tendre ciel de velours, comme elle savait grandir et s'enfler jusqu'à ce que double de proportions son mystique globe d'or dans cet air d'une molle élasticité, comme elle savait se balancer placidement au-dessus des grandes vallées volcaniques telle une lampe sacrée tandis que les brouillards au ras du sol, se mêlant aux senteurs des girofliers, de la cannelle et de toutes les épices odorantes de l'Insulinde, s'insinuaient entre les troncs dressés des arbres comme de l'encens autour des colonnes laquées d'un temple orné de sequin ! - oui, tandis que cette lune incroyable s'épanouissait, répandant son or sur la noirceur de notre jungle nocturne, nous observions la montée dans le sang même de Hara d'une marée lointaine de frénésie mythologique.
Il possédait cette espèce d'aptitude à être terrible que des millénaires de petite taille sont à même d'infliger à la vie, à titre à la fois de vengeance et de compensation pour avoir été si petit pendant si longtemps. Il avait une telle envie de haute taille et de stature imposante qu'elle s'est muée en une haine implacable des deux et quand son démon - une composante de lui-même très ancienne, insatiable et irrésistiblement réprimée qui se dissimulait quelque part au tréfonds de son être avec une autonomie et une volonté propres, cuivrées comme de l'airain - s'agitait et bouillonnait en lui, je l'ai vu rouer de coups les plus grands d'entre nous simplement parce qu'ils étaient tellement plus grands que lui. Son apparence physique elle-même était tout ensemble un refus de la normalité et une forme de rébellion contre elle, une glorification vaudevillesque et une caricature de l'archétype mâle japonais.
Vous voyez, me dit Lawrence, sa voix étouffée toute vibrante d'émotion, la graine semée chez le frère par le frère dans leur lointaine patrie a été plantée en de nombreux endroits. Elle l'a été ce fameux jour dans votre camp de prisonniers de Java. Oui, jusque dans la manière dont ils ont tué Celliers, ses ennemis ont témoigné, à leur insu, de leur acceptation de la semence de son geste puisqu'ils l'ont enseveli vivant, mais ils l'ont planté dans la terre bien droit, comme un jeune arbre tout neuf. La façon même dont ils refusaient l'acte de Celliers était la confirmation de ce qui avait été rejeté. Et puis, une nouvelle fois, il a été replanté par Yonoi sur les montagnes et dans l'esprit de son pays natal. Et, là encore, la semence est vivante car elle croît en vous et en moi.
J'avais autrefois un frère et je l'ai trahi. La trahison était si infime que la plupart des gens seraient enclins à estimer que le mot "trahison" est nettement exagéré et à juger que je fais preuve de morbidité en l'employant. Cependant, de même que l'on reconnaît à l'arbre la nature de la graine, l'arbre au fruit et le fruit au goût qu'il laisse sur la langue, de même je reconnais la trahison à ses résultats et à la senteur tyrannique qu'elle a imprimée à jamais à mes émotions.
Au printemps
Obéissant aux Augustes Esprits
Je suis parti combattre l'ennemi
A l'automne
Revenant je prie les Esprits
De recevoir également l'ennemi
I don’t know whether I’m an actor or not, and I won’t know until I see the movie in a cinema with people around me. (DB)