11 décembre 1944 - Est-ce dans Montaigne que je viens de lire que la façon de savoir à propos de quoi écrire c'est de penser à tout ce que l'on souhaiterait que les auteurs anciens eussent mentionné ? J'aimerais que les gens eussent noté les petites choses de leurs existence, celles qui leur ont fait peur, celles que les ont étonnés. Je voudrais connaitre en détail leurs maisons, leurs repas, ce à quoi ils tenaient. Je voudrais être au courant des histoires de famille et des histoires intimes qu'ils savaient.
1740 - [p. 154]
- Tu habites près d'ici ? demanda l'homme gentiment.
- Je passe l'été avec mon père et mes frères dans l'hôtel là-bas… Il fit un geste vague.
- Tu ne campes pas ?
- Non, j'aimerais bien. J'aimerais vivre comme ici dans une cabane près de l'eau, vivre à moitié nu, être tout bronzé, allumer des feux pour faire cuire mes repas, faire du bateau, nager, chanter, avoua-t-il avec envie. Est-ce que c'est votre cabane? demanda-t-il après une pause.
Un serveur démodé aux pieds plats et aux quelques rares cheveux, et une serviette sale sur les bras, les conduisit à une table. Orvil le détailla comme une relique intéressante. Le considérer comme un être humain aurait gâché le repas. Cet homme etait comme une mer d'affliction dont Orvil, en se concentrant sur le menu, repoussait les vagues. (p.40)
Ben but de la bière. Ce qu'il voulait vraiment, c'était un whisky soda, mais son sens des convenances lui rappela que cette commande serait un peu choquante pour un garçon de dix-sept ans et il n'allait jamais contre la bienséance.