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Critique de latelierlitteraire


« […] l'écriture possède un atout dont la parole est dépourvue. Elle dispose d'une machine à voyager dans le temps. Rédiger permet de retourner en arrière et de modifier le discours, de l'embellir ou de le préciser, d'y ajouter des nuances ou d'en effacer certains éléments. »
 
Avec Trystero, Laurent Queyssi (bienfaiteur traducteur du Neuromancien, @editionsaudiablevauvert) nous offre un livre loufoque et maîtrisé. Un livre dans le livre. Car son narrateur et personnage principal n'est autre que l'écrivain du livre que nous sommes en train de lire, Bruno Trivanen. Avec cette narration à la première personne, la réalité se mêle à la fiction et la fiction s'invite dans la réalité. À tel point que je n'arrêtais pas de me demander si Laurent se servait de Bruno pour s'autoriser à donner des conseils d'écriture de manière déguisée, ou si Bruno jouait simplement son rôle de personnage. L'ensemble - la forme comme le fond - est diablement bien orchestré mais aussi terriblement troublant. J'étais déboussolée par ce mix essai/fiction, et même si j'ai lu presque d'une traite ce roman, signe de mon ressenti positif, les émotions m'ont manqué.

Dans Trystero, Bruno, écrivain donc, s'adresse directement à son lecteur ou à sa lectrice. Il livre à « l'apprenti » des secrets d'écriture, classés en thématiques précises selon les chapitres, comme ont pu le faire ses prédécesseurs John Truby pour L'anatomie du scénario ou encore Stephen King dans Écriture : Mémoire D un métier.
 
Et entre deux secrets techniques, voilà que l'auteur digresse et confie à l'apprenti tout un tas d'anecdotes, parfois croustillantes, parfois inutiles, sur sa vie d'écrivain ou sur sa personne, tout simplement. Par le prisme de ses souvenirs, Bruno, considéré comme l'instigateur du mouvement de la résistance, revient sur ce qui l'a conduit en prison et sur cette période glaçante, de son arrestation arbitraire, à son isolement, ses réflexions, la douleur et la soumission.
 
Peu à peu il pose le contexte pour que le lecteur ou la lectrice comprenne. Que nous sommes dans une Europe devenue confédération nommée l'Alliance. Que le monde d'aujourd'hui bien qu'étrangement similaire au nôtre en est aussi incroyablement éloigné. Futuriste. En guerre. Technologiquement avancé. Et appauvri. Un monde où la réalité est altérée par les drogues de synthèse ou augmentée par les implants. Une société qui oppresse, contrôle les populations, sous les directives d'un régime autoritaire qui se plaît à retirer au peuple tout libre arbitre et à creuser les inégalités.
 
Mais au-delà de la souffrance et de l'injustice, il y a l'espoir. Car même enfermé et brisé, personne ne peut empêcher Bruno d'écrire librement…

Trystero est une oeuvre symbolique, qui se veut réflexive en interrogeant la place de chacun.e dans la société et le rôle crucial des livres comme outils d'expression, de lutte et de liberté. Inspirant et à relire, assurément.
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