Les femmes sont dangereuses... D'abord, parce qu'elles sont en partie des femelles, elles ont une part d'animalité qui effraie les hommes. Ainsi, la première nouvelle qui donne son nom au recueil évoque une dame à la louve. On ne connait pas son prénom, à peine sa description physique, sauf ses yeux froids et brillants comme ceux d'Helga, sa louve de compagnie, qui, elle, est nommée. La femme et l'animale semblent fusionner, comme cette autre femme d'un autre récit qui a du caïman les yeux et l'appétit sexuel. Les femmes sont dangereuses et attirent les hommes dans leurs filets, les séduisent pour les rejeter ensuite, par le mépris, par la violence, par les stilets qu'elles cachent dans leur robe. Certaines sont plus braves, plus courageuses que les hommes, qu'elles doivent lutter contre le feu, un ours, une tigresse. Elles sont fortes car elles conservent leur raison face aux xmdangers, tandis que les hommes se laissent dominer par leurs émotions, tremblant de peur, lâches et faibles dans un renversement des normes de genre.
Les femmes sont dangereuses, parce qu'elles savent ce qu'elles veulent, elles assument leurs désirs physiques, y compris ceux qui peuvent être satisfaits sans les hommes, que ce soit la virginité ou l'homosexualité en rendant un culte à Saphho et aux poétesses du désir et du plaisir féminin.
Enfin, les femmes sont dangereuses car elles affirment une liberté face aux hommes, une indépendance. Les femmes sont libres, car elles n'obéiront plus.
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J'ai beaucoup aimé les différentes nouvelles, assez sombres et mystérieuses, qui mettent en scène des femmes fortes et courageuses, notamment, face à la mort - contrairement à des hommes bien plus faibles, lâches et imbus d'eux-mêmes !
C'était très intéressant d'avoir, au travers de certaines nouvelles, le point de vue d'une femme et, dans d'autres, celui de l'homme.
La narration poétique est belle !
Pour terminer, le fait que ces nouvelles prônent un féminisme assez radical, une liberté sexuelle - forte pour l'époque - afin de se libérer de ce patriarcat, de cette domination masculine, cela est juste génial !
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Je ne sais pourquoi j'entrepris de faire la cour à cette femme. Elle n'était ni belle, ni jolie, ni même agréable. Et moi, (je le dis sans fatuité, mesdames,) on a bien voulu quelquefois ne pas me trouver indifférent. Ce n'est pas que je sois extraordinairement doué par la Nature au physique ni au moral: mais enfin, tel que je suis, - l'avouerai-je? - j'ai été très gâté par le sexe. Oh! rassurez-vous, je ne vais pas vous infliger un vaniteux récit de mes conquêtes. Je suis un modeste. Au surplus, il ne s'agit point de moi en l'occurrence. Il s'agit
de cette femme, ou plutôt de cette jeune fille, enfin de cette Anglaise dont le curieux visage m'a plu pendant une heure.
C'était un être bizarre. Lorsque je m'approchais d'elle pour la première fois, une grande bête dormait dans les plis traînants de sa jupe. J'avais aux lèvres ces paroles aimablement banales qui facilitent les relations entre étrangers. Les mots ne sont rien en pareil cas, - l'art de les prononcer est tout...
Mais la grande bête, dressant le museau, grogna d'une manière sinistre, au moment même où j'abordai l'intéressante inconnue.
Malgré moi, je reculai d'un pas.
"Vous avez là un chien bien méchant, mademoiselle," observai-je.
"C'est une louve," répondit-elle avec quelque sècheresse. "Et, comme elle a parfois des aversions aussi violentes qu'inexplicables, je crois que vous feriez bien de vous éloigner un peu."
D'un appel sévère elle fit taire la louve: "Helga!"
Je battis en retraite, légèrement humilié. C'était là une sotte histoire, avouez-le. Je ne connais point la peur, mais je hais le ridicule. L'incident m'ennuyait d'autant plus que j'avais cru surprendre dans les yeux de la jeune fille une lueur de sympathie. Je lui plaisais certainement quelque peu. Elle devait être aussi dépitée que moi de ce contre-temps regrettable. Quelle pitié! Une conversation dont le début promettait si bien!...
Je ne sais pourquoi l'affreux animal cessa plus tard ses manifestations hostiles. Je pus approcher sans crainte de sa maîtresse. Jamais je n'ai vu de visage aussi étrange. Sous ses lourds cheveux d'un blond à la fois ardent et terne, pareils à des cendres rousses, blêmissait la pâleur grise du teint. Le corps émacié avait la délicatesse fine et frêle d'un beau squelette. (Nous sommes tous un peu artiste à Paris, voyez-vous.) Cette femme dégageait une impression d'orgueil rude et solitaire, de fuite et de recul furieux. Ses yeux jaunes ressemblaient à ceux de sa louve. Ils avaient le même regard d'hostilité sournoise. Ses pas étaient tellement silencieux qu'ils en devenaient inquiétants. Jamais on n'a marché avec si peu de bruit. Elle était vêtue d'une étoffe épaisse, qui ressemblait à une fourrure. Elle n'était ni belle, ni jolie, ni charmante. Mais, enfin, c'était la seule femme qui fût à bord.
L'aurore s'était levée, et quelle aurore, mon Dieu ! C'était un grelottement de lumière transie, une stupeur grise, un grouillement d'êtres et de choses larvaires dans un crépuscule de limbes...
- Aucun homme n'est jamais revenu du désert, Maîtresse, et jamais une femme ne s'y est aventurée.
- J'y périrai peut-être de faim. J'y périrai peut-être sous la dent des bêtes sauvages. J'y périrai peut-être de solitude. Mais, depuis la rébellion de Lilith, je suis la première femme libre. Mon action parviendra à la connaissance de toutes les femmes, et toutes celles qui sont esclaves au foyer de leur mari ou de leur père m'envieront en secret. Songeant à ma rébellion glorieuse, elles diront : Vasthi dédaigna d'être reine pour être libre.
Et Vasthi s'en alla vers le désert ou les serpents morts revivent sous les rayons de lune.
J'ai brûlé les pieds d'une vieille fermière qui ne voulait pas me dire ou elle avait enfoui son argent. Mais, comme elle a fini par me révéler la cachette du magot, je ne lui ai plus fait aucun mal. Je suis au fond un excellent drille. Cette odeur de chair cuite était, d'ailleurs, par trop insupportable.
Mon interlocutrice me considérait de ses larges prunelles jaunes.
« Vous ne m’avez pas devinée. Vous vous heurtez stupidement à mon invincible dédain. Je ne sais ni haïr ni aimer. Je n’ai jamais rencontré un être humain digne de ma haine. La haine, plus patiente et plus tenace que l’amour, veut un grand adversaire. »
Elle caressa la lourde tête de Helga, qui la contemplait avec de profonds yeux de femme.
« Quant à l’amour, je l’ignore aussi complètement que vous ignorez l’art, élémentaire chez nous autres Anglo-Saxons, de dissimuler la fatuité inhérente aux mâles. Si j’avais été homme, j’aurais peut-être aimé une femme. Car les femmes possèdent les qualités que j’estime : la loyauté dans la passion et l’oubli de soi dans la tendresse. Elles sont simples et sincères pour la plupart. Elles se prodiguent sans restriction et sans calcul. Leur patience est inlassable comme leur bonté. Elles savent pardonner. Elles savent attendre. Elles possèdent cette chasteté supérieure : la constance. »
« Une anthologie de femmes-poètes ! - Eh oui, pourquoi pas ?
[…]
On a dit du XIXe siècle que ce fut le siècle de la vapeur. le XXe siècle sera le siècle de la femme. - Dans les sciences, dans les arts, dans les affaires et jusque dans la politique, la femme jouera un rôle de plus en plus important. Mais c'est dans les lettres surtout, - et particulièrement dans la poésie, - qu'elle est appelée à tenir une place considérable. En nos temps d'émancipation féminine, alors que, pour conquérir sa liberté, la femme accepte résolument de travailler, - quel travail saurait mieux lui convenir que le travail littéraire ?! […] Poète par essence, elle s'exprimera aussi facilement en vers qu'en prose. Plus facilement même, car elle n'aura point à se préoccuper d'inventer des intrigues, de se créer un genre, de se faire le champion d'une idée quelconque ; - non, il lui suffira d'aimer, de souffrir, de vivre. Sa sensibilité, voilà le meilleur de son imagination. Elle chantera ses joies et ses peines, elle écoutera battre son coeur, et tout ce qu'elle sentira, elle saura le dire avec facilité qui est bien une des caractéristiques du talent féminin.
[…]
Et puis, au moment où la femme va devenir, dans les lettres comme dans la vie sociale, la rivale de l'homme, ne convient-il pas de dresser le bilan, d'inventorier - si l'on peut dire, - son trésor poétique. Les temps sont arrivés où chacun va réclamer le bénéfice de son apport personnel. […] » (Alphonse Séché [1876-1964])
« Il n'y a pas de poésie féminine. Il y a la poésie. Certains et certaines y excellent, d'autres non. On ne peut donc parler d'un avenir spécial de telle poésie, masculine ou féminine. La poésie a toujours tout l'avenir. Il naîtra toujours de grands poètes, hommes ou femmes […]. Où ? Quand ? Cela gît sur les genoux des dieux, et nul ne peut prophétiser là-dessus.
[…]. » (Fernand Gregh [1873-1960])
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Référence bibliographique :
Alphonse Séché, Les muses françaises : anthologie des femmes-poètes (1200 à 1891), Paris, Louis-Michaud, 1908.
Images d'illustration :
Alphonse Séché, Les muses françaises : anthologie des femmes-poètes (1200 à 1891), Paris, Louis-Michaud, 1908.
Marguerite Burnat-Provins : https://christianberst.com/en/artists/marguerite-burnat-provins
Bande sonore originale : Arthur Vyncke - Uncertainty
Uncertainty by Arthur Vyncke is licensed under a CC BY-SA 3.0 Attribution-ShareAlike 3.0 license.
Site :
https://www.free-stock-music.com/arthur-vyncke-uncertainty.html
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