Quel livre prodigieux, et je pèse mes mots... !
Bernardette Murphy, historienne, a choisi, avec "
L'Oreille de van Gogh", de se pencher sur une étape clé de la vie de l'artiste : Arles (1888-1889), une période à la fois très fructueuse ("Les Tournesols", "La Maison jaune", "Le Café de nuit"...) et pleine de tourments puisque c'est dans le Midi que la santé mentale de Vincent se dégrade notablement.
Sur le fond, il s'agit d'une véritable enquête de 300 pages, conduite avec une rigueur et une ténacité exemplaires. L'autrice, en menant son investigation, a d'ailleurs activement participé à l'éclairage de plusieurs zones d'ombre de l'existence de l'artiste hollandais. le lecteur apprend, par exemple, comment s'est déroulée la journée qui a conduit Vincent à s'automutiler, qui était en réalité la jeune femme à qui il a confié son oreille, ou encore comment les différents voisins ont réagi à sa déchéance psychique au fil des semaines.
Deuxième gros point fort de l'ouvrage, l'immense sollicitude qu'éprouve Bernardette Murphy vis-à-vis de son principal protagoniste. Ici, donc, jamais de voyeurisme, mais au contraire une bienveillance totale. L'ouvrage offre ainsi un voyage bouleversant dans la vie intime d'un homme hypersensible, pétri d'états d'âme, très généreux et profondément habité par son art. Qui se suicidera en 1890 à Auvers-sur-Oise.