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EAN : 9791032901656
200 pages
L'Observatoire (28/02/2018)
3.62/5   4 notes
Résumé :
Et si nous vivions dans une société bavarde où le dialogue n'existe plus ?
Marylin Maeso, jeune philosophe camusienne, y voit un vrai danger. Polémiques systématiques, procès d'intention, culture de l'esquive... : médias et réseaux sociaux se prêtent de plus en plus à un étrange jeu du silence, sorte d'accord tacite par lequel les camps adverses en arrivent à conspirer à leur insu pour créer un univers caricatural où la communication est rendue impossible. O... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Marylin Maeso, normalienne, agrégée et professeure de philosophie, elle travaille sur l'essentialisme et sur la philosophie politique contemporaine. Paru en 2018, Les Conspirateurs du silence, son premier ouvrage, vient d'être réédité dans une collection de poche.
Je connaissais Marylin Maeso par le réseau social Twitter – ce vaste dépotoir où parfois l'on voit fleurir une fleur… Une voix digne, jamais haineuse mais toujours prompte à réagir aux propos ignobles des uns et des autres par une argumentation solide, un combat sans fin (semble-t-il) contre le racisme, l'homophobie et j'arrête là, la liste des infamies dont se nourrit l'oiseau bleu. Je ne pouvais donc pas ignorer ce petit essai.
Lorsque Marylin Maeso a ouvert son compte Twitter, elle pensait (naïvement ?) entrer dans un lieu de discussions, d'échanges riches et de confrontations d'idées mais très vite le constat s'est imposé : ici tout n'est que prétexte à polémiques, insultes et autres joyeusetés du même tonneau. D'où cet essai dont le titre est emprunté à un article de Camus où il déplorait l'impossibilité de débattre (en 1948 déjà !) ou bien de prononcer certaines vérités. Oui, c'est le paradoxe de notre époque, tout le monde parle mais personne ne dit rien. du moins, rien de constructif, au contraire même. Nous en sommes arrivés à un point où certains mots sont devenus tabou (je vous laisse choisir votre hashtag), les prononcer du bout des lèvres nous expose à la vindicte quasi générale : certains en font leur fonds de commerce tandis que d'autres préfèrent ne pas les employer et donc s'autocensurent. Quand il devient impossible de s'entendre sur les mots, comment voulez-vous discuter ? Cet ouvrage permet à la philosophe de démonter les mécanismes de la situation en s'appuyant sur Camus, Bergson etc.
J'avoue ne pas être entièrement satisfait par cet essai – qui mérite néanmoins d'être lu. Tout d'abord parce qu'il se partage entre passages très clairs et simples à lire – surtout au début du livre - et d'autres qui m'ont paru plus complexes, n'ayant pas le niveau ou les connaissances intellectuelles suffisantes. Mais surtout, parce qu'un long chapitre est consacré à répondre à une polémique avec Houria Bouteldja (une militante politique franco-algérienne, porte-parole du Parti des Indigènes de la République et très controversée) dont j'ignorais tout.
Conclusion : le bouquin est très court, il peut donc être lu avec grand intérêt pour certains passages et l'auteure me semble une belle personne dont la voix mérite d'être entendue et la pugnacité à combattre les contre-vérités saluée.
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Le silence pourrait apparaître comme un paradoxe dans une société bavarde, hyper connectée ou existent des centaines de canaux différents pour exprimer ses pensées. Mais il s'agit de silence face à l'absence de réel débat. En effet, le vrai débat, le dialogue ont disparu au profit de la polémique, du buzz. Personne ne peut y échapper, car nous portons tous en nous "la peste" (Camus).
Dialoguer invite à remettre en cause ses certitudes, accepter d'être contredit mais sur la base de ses idées. La polémique contemporaine essentialise les individus, leur colle des étiquettes en fonction de ce qu'ils sont supposé être ou penser. Il ne s'agit plus d'un débat mais d'un procès d'intention où l'autre est discrédité, disqualifié. Les idées de l'énonciateur comptent moins que le caractère qu'on lui prête.
Généraliser, classer après observation, travail et étude est nécessaire dans des sciences collectives : sciences, sociologie mais cela pose problème au niveau individuel d'autant que cette généralisation, essentialisation se fait a priori et ôte aux êtres leur singularité. Cette généralisation permet d'intimider l'autre et tourne au procès d'intention comme le procès de Meursault dans l'Etranger de Camus.
La réaction viscérale a remplacé la pensée réfléchie.
Certains antiracistes comme Houria Boutjelta emploient (selon Marylin Maeso) les mêmes méthodes d'essentialisation qu'ils condamnent que ce soit envers les Blancs ou les "racisés" assignés à résidence, réduits à l'état de victimes.
L'essentialisation, l'abstraction est en oeuvre dans la logique de l'inhumain.
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De débattre, mon époque s'est arrêtée… Ces quelques mots en introduction illustrent parfaitement l'ouvrage de Marilyn Maeso.

Le débat n'est plus une confrontation d'idées, d'opinions argumentées ; le dialogue n'est plus un échange de points de vue, d'informations, d'expériences… juste pour le plaisir de la discussion.

Les réseaux sociaux participent au déferlement de polémiques à répétition, de controverses et d'invectives. En ouvrant un compte Twitter en 2016, Marilyn Maeso en fait l'expérience et, par ses interventions sur de nombreux sujets, tente obstinément de faire renaître le dialogue.

Au fil des pages, elle cite l'écrivain-philosophe toujours moderne, Albert Camus. Elle argumente et dissèque de nombreux thèmes :

. la force et le courage des nuances face à une vision manichéenne du monde
. l'essentialisation qui enferme l'individu et lui pose une étiquette
. les « dérapages » dans les médias
. l'importance d'employer la bonne terminologie notamment lorsque les sujets sont brûlants
. les indignations à géométrie variable
. l'anonymat sur les réseaux sociaux
. le recours à l'intimidation pour faire taire son interlocuteur
. les débats qui se terminent en conflits absurdes

Toutefois, elle relève que son expérience, notamment avec « l'oiseau bleu » est loin d'être négative.
Twitter est un outil merveilleux pour découvrir des personnes inspirantes, attachantes, donner de la visibilité à des témoignages, partager des expériences, rassembler autour d'une cause commune…

Dans le dernier chapitre, l'autrice nous parle « d'amour » et ce n'est pas un hasard quand on sait que son livre traite de la difficulté de dialoguer loyalement, sans insulte et attaque personnelle.

Dans sa conclusion, une phrase interpelle : « À une époque de manichéisme universel, se vouer à la nuance est un acte révolutionnaire ». À nous de l'entendre !

Un livre percutant, teinté d'humour, lucide sur notre époque, qui éclaire par la cohérence du raisonnement et de l'argumentation et de nombreuses pistes de réflexion.


Lien : http://irisyne.wordpress.com
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
… nos échanges se réduisent généralement, touchant les questions qui portent des enjeux essentiels, à une série de monologues qui s’entrecroisent sans jamais se rencontrer. C’est éminemment le cas des débats tournant autour de l’antiracisme. Quelles discussions possibles entre des camps qui se considèrent mutuellement comme ennemis, dont chacun es persuadé de détenir la clé de compréhension de la nature véritable des rapports sociaux là ou l’autre se fourvoie dans la mystification idéologique la plus totale, et qui emploient les mêmes termes sans parler des mêmes choses ? Nous parlons tous, continuellement, de « racisme », sans jamais nous mettre d’accord sur le sens précis que nous donnons à ce mot, et c’est parler, sinon pour ne rien dire, du moins pour ne rien transmettre que de ne prêcher qu’aux convaincus.
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... Sur Twitter, l'autre devient, sous l'oeil sans regard d'une bande d'anonymes scélérats, une abstraction que l'on peut torturer en silence et sans éclaboussures, l'esprit léger. Il faut bien que les lâches aient, eux aussi, leur fight club...
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A une époque de manichéisme universel, se vouer à la nuance est un acte révolutionnaire.
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On débat pour convaincre, on polémique pour anéantir.
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Videos de Marylin Maeso (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marylin Maeso
Marylin Maeso, spécialiste de la pensée d'Albert Camus, travaille sur l'essentialisme et la philosophie politique contemporaine. Auteure notamment des "Lents demains qui chantent" (2020) à L'Observatoire, elle avait auparavant publié "Les conspirateurs du silence" (coll."La relève" dirigée par Adèle van Reeth, L'Observatoire, 2018). Un essai qui dénonce l'"esprit de système" qui aujourd'hui empêche tout dialogue. C'est notamment le cas sur Twitter, réseau auquel Marylin Maeso s'est inscrite en 2016 et dont l'évolution nous parle d'un mal qui a pris la société entière. En outre, dit-elle, l'anonymat y sert de catalyseur de haine.
Une émission avec Julien Bisson, rédacteur en chef de l'hebdomadaire "Le Un".
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