Si différents qu'ils paraissent dans leur technique, il existe plus d'un point de contact entre M. Gustave Moreau et M. Puvis de Chavannes. Tous deux procèdent au fond des mêmes tendances, tous deux rendent le même culte aux hautes idées. Où l'un simplifie, l'autre complique, mais ils se rencontrent et s'unissent cependant tous deux dans le mysticisme et dans son expression par l'allégorie et le symbole. Ils sont l'un et l'autre des intellectuels, des penseurs solitaires, vivant tout à fait en dehors de la vie courante et qu'on ne saurait juger avec les règles ordinaires.
Avec les Impressionnistes, cette nouveauté s'est rapidement propagée et imposée, et le nombre des artistes engagés dans ce mouvement, très restreint au début, est devenu légion. Le plein air, la lumière, le grand. soleil, c'est là la vivante et dominante inquiétude et aussi la séduisante poésie du tableau moderne comme l'a été le clair-obscur.Parmi les artistes contemporains, il en est bien peu qui, délaissant le jour égal et froid de l'atelier, n'aient peint des sujets pris dans le grand air de la rue ou des champs, même aux heures où la lumière a le plus d'éclat.
La lutte entre classiques et romantiques est depuis longtemps terminée. Plus de belles passes d'armes ; plus de lances rompues; plus de bruits de combats! Mais aussi, adieu les généreuses fièvres, les colères inspiratrices, les nobles et salutaires enthousiasmes! Si quelques vétérans, témoins actifs de la bataille héroïque de jadis, survivent encore, il y a beau temps qu'ils se sont assagis... Une paix s'est faite, peut-être un peu énervante, qui a réconcilié sous les plis d'un même drapeau les ennemis d'autrefois.
Le grand succès du moment, dans la peinture des portraits féminins, appartient sans conteste à M. Carolus Duran. Sa dernière exposition au Champ-de-Mars a été pour lui un véritable triomphe. Il est désormais le peintre attitré de toutes les élégances et de toutes les splendeurs, des étoffes somptueuses, et des attitudes composées, tantôt souriantes, tantôt hautaines; il est enfin, par excellence, le peintre à la mode. Sans être un physionomiste très profond, M. Carolus Duran, nous apparaît plutôt comme un magnifique improvisateur, et il serait encore, à notre avis, un portraitiste supérieur par l'aisance, par la verve, plutôt que par la conscience et la sincérité à rendre ses modèles qu'il campe et anime, d'ailleurs, superbement dans la vérité extérieure de leurs allures, de leur port de tète, de leur expression habituelle et de leurs ajustements.
De tous les élèves de David, nul ne fut plus que Antoine-Jean Gros (1771-1835) respectueusement dévoué et docile à son maître; nul ne fit plus, sans le vouloir et le savoir, pour préparer et pour armer l'insurrection qui devait détrôner son école. Tandis que David, après le Sacre, — pour rester fidèle à l'histoire et au style — renonçait à compléter la série des quatre grands tableaux commémoratifs qui lui avaient été commandés, Gros trouvait dans les spectacles de la guerre, dans la peinture des choses vues ses plus fortes inspirations et son plus grand plaisir.