S1E21 - Confidences d'écrivain·e·s: Catherine Mavrikakis et Mathieu Leroux
Dans leurs livres publiés cet automne, Catherine Mavrikakis et Mathieu Leroux parlent d'un·e parent disparu·e, mais aussi de l'absence. Venez écouter leurs confidences.
Avec:
Catherine Mavrikakis, autrice
Mathieu Leroux, auteur
Billy Robinson, animateur
Livres:
L'absente de tous bouquets, Catherine Mavrikakis, ÉDITIONS HÉLIOTROPE
https://www.salondulivredemontreal.com/livres/l-absente-de-tous-bouquets
Avec un poignard, Mathieu Leroux, ÉDITIONS HÉLIOTROPE
https://www.salondulivredemontreal.com/livres/avec-un-poignard
Le Salon dans tes oreilles est un balado issu des entrevues, tables rondes, et cabarets enregistrés dans le cadre du Salon du livre de Montréal 2020. Écoutez des auteurs, autrices et personnalités parler de livre, de lecture et d'écriture et échanger autour des cinq thématiques suivantes: le Féminisme, la Pluralité des voix, 2020, et après?, Récit et inspiration et Famille et enfance. Bonne écoute!
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... parce qu'elle me dérange, et que je préférerai toujours l'inconfort que je ressens devant les photos de Terry Richardson au divertissement que je ne ressens pas devant la télé câblée.
La caresse est agréable, mais quelque chose en moi choisit le coup de poing.
Il n'y a aucune raison pour m'amener à sortir d'ici.
La tanière est fraîche et sombre.
La cage impose une limite entre moi et le reste du monde.
Je peux lécher mes plaies, tranquille.
Plaisir solitaire malsain.
Métro. Repérage rapide de ceux qui amorcent leur soirée : panaches flamboyants. Démarcation claire avec le lot de gens gris et défaits par leur journée de travail. Paons contre rats ; phasianidés superbes à la recherche d’approbation, rongeurs ternes avides de miettes de satisfaction. Rejeter la vermine et les oiseaux — pas assez de chair dans les deux cas. Éclairage artificiel qui met en évidence le charme de certains et la laideur des autres. Sur le terrain, toujours quelques victimes potentielles à flairer. Exaltant.
Crisse de cave.
20 minutes plus tard.
Rien. Sec.
Je m’endurcis. Je refuse que quoi que ce soit craque. Je cache ma colère en dessous de l’ego froissé. Je me concentre sur la canicule. Je serre davantage les poings. Je chasse l’idée d’une potentielle ressemblance entre l’autre-fils et moi. Entre les pulsions respectives qui nous mangent. Je ne comprends pas tout à fait ce que veut dire « être un homme » dans une famille où il n’y en a aucun. Où la posture de l’homme ne s’est incarnée que sous la forme d’un bourreau. Je refuse de ressentir autre chose que le sang qui n’afflue plus dans mes doigts et la canicule. C’est tout.
Ma mère-veilleuse s’éteint.
Le téléphone n’a plus de tonalité.
La télé, sur « mute », continue d’agresser par son constant flot d’images.
La rafale projetée n’arrive pas à taire le silence de ma mère-fusillée.
Je pense au sexe constamment. Je peux me piocher pendant des heures en n’éprouvant aucune satisfaction. La pornographie et son vaste choix d’hommes remplacent ceux que je ne rencontre pas à New York. Je suis capable de me masturber jusqu’au sang. Les lésions me rappellent de vieilles morsures au bras. Cachée dans mon sous-vêtement, ma solitude se déguise à l’aide des plaies que la masturbation compulsive laisse sur mon sexe.
Deux hommes ensemble c’est pas normal, c’est une maladie mentale, ça peut pas être heureux. Ça boit, ça se drogue, ça se déguise, ça pleure quand ça mange une claque. On devrait pas montrer ça à la télé. On devrait même pas parler de ça. Ça. Ce mot que même la télé de mon beau-père prononce désormais si facilement. Homosexuel. Avec tout le subtil mépris dont la télé est capable.
Les clients du bar, si beaux quand ils sont noyés dans le gin et la musique forte, mais tellement inintéressants quand la musique s’arrête.