Je réalisais soudain combien je m'étais montré imprudente. M. Kauffmann, Fernand, Lucienne, je m'était mise à les aimer, tous, sans le faire exprès, sans même m'en rendre compte. Pas autant que ma mère, bien sur, mais enfin, assez pour en souffrir. Je m'étais fait avoir avec les sentiments, on ne devrait jamais. A présent , j'en payais le prix, et je mesurais que c'était inabordable. Denrée de luxe, trop risqué pour les cœur malmenés.
Alors, j'ai décidé que je ferais attention désormais. A garder mes distances. A ne pas m'attacher, surtout pas. Me préserve, tout fermer à double tour-réserve, confort, sécurité. C'était nécessaire, c'était vital. Je savais qu'un nouveau chagrin me tuerait.
-Lila
"Je voulais que tu saches que je ne t'en veux pas"
-Lila
C'est cela, sans doute, faire son deuil : accepter que le monde continue, inchangé, alors même qu'un être essentiel à sa marche en a été classé. Accepter que les lignes restent droites et les couleurs intenses. Accepter l'évidence de sa propre survie (page 348)
Mais on finit toujours par y arriver lorsqu'on y met le temps (page 249)
[…] Fin janvier, les deux familles se rencontrent, lors du dîner de fiançailles organisé par les parents de Bérengère. Mme Le Clair est définitivement rassurée : chez les Clouet aussi, les fauteuils Louis XVI sont d’époque.
[…] – Quand tu es arrivée ici, il y a quatre ans, on ne nous a communiqué aucune information concernant ta maman. Ni son nom, ni son âge, ni même une photo. Je ne sais pas ce qu’elle est devenue, Lila. Je suis désolé.
– Vous ne savez rien ! Il a secoué la tête avec tristesse.
– Quelques semaines après ton arrivée, on nous a informés que ta mère venait d’être déchue de ses droits maternels. C’est tout ce que l’on sait.
De simples présomptions. Rien n'a été prouvé. ça ne les a pas empêchés de monter l'affaire en épingle, d'affoler l'opinion pour ensuite faire voter leurs putains de lois restrictives. Du pipeau : s'est-il mis à beugler. La censure qui se drape dans le principe de précaution !
Ça n'est pas agréable de devenir une femme, parce qu'on en met partout.
(P93)
"Ils l'ont plaquée au sol, et l'ont emprisonnée dans une camisole. Puis ils l'ont bâillonnée. J'ai tout vu, ses larmes, ses yeux fous, les bleus sur son visage. Elle n'essayait plus de résister. Elle me regardait fixement. J'ai compris ce qu'elle voulait me dire. Au revoir, mon bébé. Plusieurs fois, elle a cligné des yeux. Chaque battement de paupières était comme un baiser. Je t'aime. Je t'aime. Je t'aime. Et elle m'a souri, derrière le bâillon."
Pour un second roman bravo! Tres diffèrent du premier (une piece montèe) que j'avais bien aimè, ici c'est une enquete que nous suivons sans vouloir nous arrêter grace a une ècriture nerveuse meme si le contexte est plutot "lourd"