Un après-midi, en allant et venant tous les trois entre la maison et le container aux encombrants, les bras chargés de tout c fourbi, ils réalisèrent que, désormais, ils étaient en première ligne. Plus question de se défausser sur les vieux, plus moyen de dire : ça, c'est votre faute. À partir de ce moment ils étaient pleinement responsables de leur monde. Et sur le champ de bataille de la vie plus personne pour faire écran . Pourtant ils n'avaient pas l'impression que leur enfance fut si loin que ça, en extrayant des caisses de jouets le train miniature, le lapin en peluche ou le petit pot de lait de Marimekko...
Un héritage maternel s'accepte ou se refuse, mais le legs insaisissable d'une histoire familiale passée sous silence, faite de drames intimes non résolus, de culpabilité refoulée et de mensonges inavoués, agit sournoisement, en filigrane, on ne peut que le subir. (p. 42)
(...) comme si le premier amour était aussi le denier et que sa première empreinte, irrésistible, perdurait indéfiniment en dépit des suivants.
Nous les vieux sommes à jamais les exilés de notre lointaine jeunesse. Un exil définitif , sans nul espoir de retour. (p. 95)
Après des décennies de fuite en avant, toujours occupé, toujours pressé - au diable le passé - j'entame maintenant la fuite en arrière vers les contrées lointaines de mes souvenirs enfouis. Comme si là était le salut, là-bas derrière moi. Parce qu'il n'y a plus rien devant. Je ne peux plus, comme jadis, fuir dans l'avenir.
Deux pages (p. 178 et 179) pour décrire un voyage dans un train des années 1960. C'est joliment écrit.