Mémoires d'un appelé en Algérie

Tout d'abord, avant de commencer ma chronique, je tiens à remercier Babelio et les éditions Sud Ouest pour m'avoir permis de découvrir ce livre.
Donc, Mémoires d'un appelé en Algérie est un livre de Pierre Brana, dans lequel il raconte son histoire, la période qu'il a vécu en Algérie, au moment de la guerre. Pierre Brana est un jeune homme de 21 ans, qui apprécie beaucoup l'école, qui est même très doué pour cela et nous allons voir plus tard qu'il sera considéré comme un intellectuel .. Il est aussi un homme très intéressé par la politique, je le trouve aussi très concerné par la guerre d'Algérie dont il va se renseigner un maximum avant d'entrer dans le vif du sujet au fil des pages … le moment où Pierre Brana fut appelé sur le terrain comme on dit, et là, tout s'enchaîne ..
J'ai eu beaucoup de mal au début du livre car je trouvais que Pierre Brana parlait beaucoup de politique, utilisait beaucoup d'abréviations de partis, de groupes et tout cela. Maintenant que j'ai fini le livre, j'ai compris qu'il était indispensable de replacer la période dans son contexte vraiment décrit pour pouvoir tout comprendre. Par contre, j'aurai préféré qu'il y ait une aide sous forme de frise chronologique ou autre en annexe pour que cela soit beaucoup moins compliqué.
Pour moi, pas question d'arrêté un livre alors que je ne l'ai pas terminé, alors j'ai persévéré et la, j'ai eu une toute autre impression ! La réalité en Algérie racontée par Pierre Brana était incroyable, j'avais envie d'en savoir plus et à partir de ce moment, ce livre fut pour moi un véritable bonheur.
Je me suis attachée à l'auteur qui pour moi est un homme remarquable. Il raconte cette guerre d'Algérie, avec son point de vue mais en même temps celui des autres, qu'il respecte, ce que je trouve très fort. Pierre Brana fait aussi bien la différence entre un « appelé » en Algérie et un « engagé » en Algérie, là est toute la différence. Même s'il est contre cette guerre, il sait qu'il n'a pas le choix d'y aller mais va donc tout faire pour faire remarquer ses talents et sera respecté de tous. Pierre Brana va nouer des liens avec des Pieds Noirs en donnants des cours, va essayer une fois de plus de connaître la cultures de ces gens la, contre qui il doit combattre .. J'ai trouvé que l'auteur laissait ressentir ses émotions, ce qui fait que nous avions l'impression de les ressentir en même temps que lui et donc entrer totalement dans ses souvenirs.
J'ai eu beaucoup de plaisir de lire sur cette guerre d'Algérie dont très peu de gens parlent. Ca nous permet de nous rendre compte des choses, que cette guerre était en réalité une guerre inutile ..
Personnellement, un membre de ma famille a été appelé pour combattre en Algérie mais tout comme Pierre Brana, qui a gardé le silence pendant 50 ans, lui, le garde encore, alors maintenant que j'en connais un peu plus sur le sujet, serait-ce une occasion de lancer une discussion .. N'oubliez pas, demain, 19 mars, ce sont les 50 ans de la fin de la guerre d'Algérie !

Le silence est d'or.
L'auteur est un homme de gauche, et il ne s'en cache pas...d'ailleurs pourquoi le dissimuler quand on a été conseiller de Michel Rocard, député socialiste et spécialiste des affaires étrangères.
Soixante pages pour que l'auteur se présente et nous fasse l'historique de l'entrée de la France dans cette guerre coloniale. Il est à noter que les gouvernements ont des pudeurs de vocabulaire bien hypocrites pour parler de cet état de faits ! « Évènements » ici, « Troubles » en Ulster, cachez-moi ces révoltes que je ne saurais voir !
L'opinion publique en France est majoritairement hostile à cette guerre, mais le gouvernement met le doigt dans l'engrenage...exactions d'un côté, répressions de l'autre, lesquelles répressions sont souvent disproportionnées  soulignant le rôle peu glorieux d'une certaine gauche et de l'état français en général.
Le sursis de Pierre Brana arrivant à échéance, le sort ou la malchance le désigne comme partant pour le conflit ! le voyage dans des conditions déplorables depuis Marseille, bateau et train en Algérie, incertitude sur la destination, puis la découverte du lieu de garnison, « Le Kroubs » dans le Constantinois.
L'armée est divisée en deux blocs : la hiérarchie, adepte de la loi et l'ordre (surtout par la force) est pro Algérie Française ; de l'autre bord, les appelés (sauf Pieds noirs) eux sont pour l' indépendance et le plus vite possible. Mais sur le terrain, surtout à Alger, l' OAS et le FLN, chacun voulant porter un climat de terreur et d'insécurité dans l'autre camp, multiplient les attentats et pratiquent la torture et les mutilations. Les barricades dressées par les Européens dans la capitale algérienne discréditerons leurs auteurs, surtout chez les appelés....
La vie continue, l'espoir d'une éventuelle permission, les retours au Khroubs , non sans une très grande appréhension , de quoi demain sera-t-il fait ? Les cours prodigués à certains appelés et à de jeunes musulmans qui meublent les journées. La maladie aussi, la convalescence avec la lecture pour garder le moral et ne pas avoir le sentiment de perdre son temps.
Mais aussi les morts, en particulier un ami, communiste partisan de l'indépendance tué par un homme dont il partageait les convictions ! Et toutes les victimes d'un bord ou de l'autre....Les premières tentatives de dialogue achoppent sur le problème du Sahara et de son pétrole....
Plein de personnages publics très connus à l'époque, certains vite oubliés. Tous très impliqués à un titre ou à un autre dans la politique française vis à vis de la question algérienne. de De Gaulle à François Mitterand en passant par Chaban-Delmas (Bordelais lui aussi) ou encore Michel Debré sans oublier les généraux putschistes d'Alger.
D'autres plus anonymes, des familles françaises ou pieds-noirs, des gradés de toutes sortes, certains humains, d'autres militaires jusqu'au bout des doigts.
Les dégâts sur les combattants, blessures physiques qui peuvent se guérir, mais les séquelles morales furent très certainement pires, et expliquent les silences des jeunes du contingent à leur retour qui souhaitaient oublier le plus vite possible. Mais pour tous malheureusement l'oubli et  la paix morale et psychologique ne furent pas au rendez-vous! Et pendant longtemps les jeunes revenant d'Algérie n'en ont pas parlé...comme s'ils avaient un sentiment de honte en eux !
Le regard d'un appelé instruit, sursitaire, donc plus âgé, marié, déjà fortement impliqué politiquement et syndicalement, ce qui n'était pas le cas de la majorité de ses copains de chambrée.
J'aurais préféré personnellement que la période de la guerre d'Algérie soit traitée plus longuement, surtout les mois passés sur le terrain, que j'ai trouvé un peu noyée entre les études de l'auteur et certaines considérations politiques qui, tout en étant très utile, occupent plus d'un tiers de l'ouvrage.
Une interrogation clôt ce livre :
-Pouvait-on éviter cette tragédie, cet épouvantable gâchis ?
Cette question n'aurait jamais dû se poser, car pour moi la réponse est bien évidement « OUI »...
Que de morts et de souffrances dans les deux camps pour rien pour un résultat qui était inéluctable. Beaucoup des jeunes gens décédés en Algérie auraient pu être mes frères aînés et nous avons encore le sentiment qu'ils sont morts pour rien !
Ne pas oublier qu'au milieu de tous ces évènements la pensée principale de l'appelé était la suivante :
-« Quand aurons-nous la Quille ?»
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